samedi 9 février 2008

Le divorce, la « fuite » de la personne SFC, l’abandon moral du conjoint, font aussi partie intégrante de l’univers du syndrome (comme d’ailleurs dans beaucoup d’autres maladies).

La « fuite ».

  • Comment prendre soin d’une famille quand on n’a même pas la force de s’occuper de soi, comment supporter toutes ces demandes (petites ou grandes), ces réclamations lorsqu’on sent qu’on est en train de plonger et que la famille est en train de nous épuiser, sans même sans rendre compte, car souvent les désirs des enfants, conjoints, parents paraissent légitimes.
  • Comment subir l’abandon moral (voir ci-dessous) sans souffrir atrocement ?
  • Les soignants des personnes SFC leur demande d’apprendre à savoir dire « non » mais cela reste incompris : on dira d’eux qu’ils sont paresseux, égoïstes, mauvais parents et tout ce qu’on peut imaginer.
  • Ainsi, ils préfèrent se couper de leur famille même si cela leur brise le cœur et qu’ils ne sont pas responsables de ce qui leur arrive.
  • C’est une démarche « d’autodéfense » et d’amour aussi : ne pas faire porter à la famille le poids du SFC et leur donner l’occasion de refaire une vie plus épanouie.

L’abandon moral

  • Il faut aimer beaucoup pour supporter le SFC, cet étranger qui surgit dans la famille. Souvent, les amours « tièdes » ne résistent pas, la famille veut continuer à vivre comme avant, à faire semblant que la maladie n’existe pas. Elle impose un rythme infernal ou se désolidarise de la personne atteinte qui se trouve alors bien seule.

Quelques exemples de phrases « assassines », livrées ici en vrac et dont la liste n’est malheureusement pas exhaustive. Il en existe tant !

« A oui, bien sur, tu as mal – soupir excédé »
« C’est bien de pouvoir faire une sieste tous les jours, je t’envie. »
« Ce n’est pas possible que tu ne te souviennes pas de cet événement-là »
« D’accord, je connais la chanson »
« Dépêches toi »,
« Encore mal à la tête ? – agressif »
« Et si tu pensais à autre chose ? »
« Fais un effort, bon Dieu ! »,
« Fais un peu de sport, cela ira mieux »
« J’en ai marre que tu te retranches derrière ta maladie à tout moment »,
« J’en ai marre : Arrête de regarder ton nombril »,
« Je monte dormir – déjà ? »,
« Je rentre du boulot et le souper n’est pas prêt. Tu n’as pas fait les courses ?Mais, qu’as-tu fait de ta journée ? »,
« La mère de ma meilleure amie, elle, elle s’occupe d’elle »,
« La semaine prochaine, tu seras mieux pour qu’on puisse aller là ? »
« Laisse moi faire, ça ira plus vite »
« Les autres hommes font ceci, ou cela, toi tu n’es jamais prêt ».
« Mais si, rappelle-toi. »
« Maman, pourquoi ne veux-tu jamais venir au foot avec moi »,
« Non mais, tu écoutes ou pas ? Tu me fais toujours répéter. C’est énervant à la longue »
« Papa, tu n’as pas réparé mon vélo ? Ca fait des jours que je te le demande »,
« Pourquoi ne vas-tu pas faire les soldes ? »,
« Quand tu travaillais, on pouvait partir en vacances »,
« Quoi, tu ne te rappelles plus ? Et bien c’est flatteur »
« Secoue-toi »
« Si tu mangeais mieux … ou plus »
« Tu as toujours une excuse. »,
« Tu as trop bu ? »
« Tu en as de la chance de ne plus travailler »
« Tu fais la gueule ? »
« Tu fais régime ? »
« Tu mets toujours ce vieux pull horrible ! »
« Tu n’as rien fait aujourd’hui ? »
« Tu ne veux pas venir à …, au …, tant pis, j’y vais seul ! » (De temps en temps, ce n’est pas grave, mais quand cela se répète tout le temps, le désamour est très proche),
« Tu te plains tout le temps » (mais non, j’explique, je me justifie !)
« Une fois de plus, la lessive n’est pas faite. »
« Viens regarder ce film, cela te distraira … Comment veux-tu que je comprenne quelque chose si tu poses tout le temps des questions »
«Pourquoi n’invite-ton pas les amis du tennis ce WE ? Non ? Avec toi, c’est toujours la même chose… »


Personne n’oserait faire de pareilles réflexions à quelqu’un qui a un handicap grave, qui suit une chimiothérapie de choc, qui a une tumeur au cerveau, une maladie du cœur, etc. Le problème avec le SFC, c’est que la maladie est extérieurement invisible et mal comprise.

Quand ces propos se répètent à longueur de journées, il faut parler d’abandon moral.

  • Faire comme si SFC n’existait pas, faire comme si la personne était responsable des discussions, des disputes, en sous-estimant la maladie, l’accabler en la comparant avec les autres, en la comparant avec ce qu’elle était avant, n’est certes pas une preuve d’amour.
  • Souvent le divorce n’est pas loin et tout ça, parce que la famille passe son temps à oublier que la première personne qui souffre dans son corps, dans sa fierté, qui souffre de ne pas pouvoir faire plus pour les gens qu’elle aime est la première victime de ce qui lui arrive.

Elle n’a pas demandé à être malade, ni de devoir se priver de presque tout ce qui faisait son bonheur de vivre avant que cela ne lui tombe dessus.


A savoir : Le SFC peut atteindre n’importe qui : Le SFC affecte toutes les ethnies, tous les groupes socio-économiques, tous les groupes d’âge et les hommes comme les femmes même s’il semble y avoir une prédominance chez les femmes, possiblement liée aux niveaux d’hormones.
Le SFC affecte souvent des personnes qui auparavant étaient très dynamiques, très actives dans leur vie professionnelle, familiale et sociale. Cela leur rend le SFC d'autant plus pénible.

Si vous faites partie des gens qui abandonnent moralement leur conjoint, leur ami, leur collègue …, réfléchissez, car vous pourriez bien être sur la liste des prochains élus du syndrome. Il n’est pas contagieux mais personne n’est à l’abri.

Et si vous n’êtes pas encore convaincu, lisez cette citation de Dr. Mark Loveless, directeur de la clinique du SIDA et du SFC, département des sciences de la santé de l’Université de l’Oregon.
« Un patient atteint du SFC se sent chaque jour comme un patient atteint du SIDA se sent deux mois avant de mourir »